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Des mythes qui ont la vie dure à propos du vieillissement démographique - Blog gérontologique de Richard Lefrançois
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  • Richard Lefrançois
  • Retraité et professeur associé (Université de Sherbrooke, Québec), Sociologue, gérontologue
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3 novembre 2007 6 03 /11 /novembre /2007 16:54

(R. Lefrançois, La Tribune, 3/11/2007)
NDLR - Au moment où le vieillissement de la population et le sort des aînés font l'objet d'une grande réflexion, le spécialiste sherbrookois en gérontologie Richard Lefrançois a accepté de partager avec les lecteurs de La Tribune, une fois par mois, ses réflexions et ses constatations sur la contribution à la société du pouvoir gris. Bonne lecture!


Certains analystes proclament haut et fort que le vieillissement démographique met en péril notre société. Nous serions à l'aube d'une crise majeure des finances publiques, de la déroute de notre système de santé, d'une réduction du panier de soins, de la faillite des régimes de retraite, d'une pénurie de main-d'oeuvre et d'un conflit intergénérationnel. Nos aînés coûteraient plus cher qu'ils ne rapportent et pourraient précipiter la société dans une impasse.

Pourtant, de nombreuses études, dont celle de l'Oxford Institute of Ageing, ont démenti le mythe que les personnes âgées ponctionnent nos ressources vitales. Non seulement elles ne surchargent pas notre système économique et de santé, mais elles représentent un apport inestimable.


Les retraités vitalisent et régularisent l'économie

Grâce à leur gigantesque pouvoir d'achat et à l'"effet de levier" de leurs placements sur le marché, les retraités font tourner la machine économique comme consommateurs, investisseurs et contribuables. En taxes et en impôts seulement, cela représente plus de 2,2 milliards de dollars à l'échelle canadienne.

Le vieillissement ne menace aucunement nos régimes de pension qui demeurent suffisamment approvisionnés. L'épargne des retraités ne cesse de s'accumuler et de se diversifier, dont celle d'un nombre accru de femmes ayant participé sur le marché du travail. Le résultat est que l'augmentation des retraits imposables aux régimes enregistrés d'épargne-retraite (RÉER) se traduit par des rentrées fiscales croissantes.

La crainte d'une pénurie de main-d'oeuvre à la suite des départs massifs à la retraite semble écartée, car les flux d'immigrants affichent une nette progression, tandis que les retraites précoces fléchissent et que de plus en plus d'aînés retournent sur le marché du travail au terme de leur lune de miel comme retraité. La hausse récente du taux de natalité au Québec devrait produire le même effet bénéfique.

En plus de dynamiser les créneaux en pleine expansion, comme les services de proximité, la domotique et l'hébergement collectif, les aînés alimentent et régularisent des secteurs clés, tels le tourisme et la rénovation domiciliaire, surtout en période creuse. Et puis, même les gens malades ou en incapacité profitent à la société! Pensons aux emplois directs ou indirects créés dans les domaines de la santé, de l'industrie pharmaceutique et de la recherche biomédicale.

La participation des aînés comme bénévole et donateur demeure sous-estimée. Au Canada, les 400 millions d'heures qu'ils consacrent annuellement au bénévolat totalisent 3 milliards de dollars, calculés sur la base du salaire minimum. Sans ce bénévolat, le gouvernement devrait injecter un montant plus élevé en salaires pour combler les mêmes besoins. Enfin, 87 pour cent des aînés versent des dons de charité, en moyenne 600 $ par individu annuellement, soit davantage que tout autre groupe d'âge.


Notre système de santé court-il au désastre ?

Le principal déterminant de la consommation de services et de médicaments demeure le nombre de maladies chroniques. Or, la clientèle lourde chez les aînés atteint à peine 4 pour cent, tandis que 88 pour cent sont autonomes. De saines habitudes de vie et des traitements médicaux plus efficaces expliquent l'amélioration générale de l'état de santé de nos aînés. L'Institut canadien du vieillissement constate l'impact positif de tels changements; la durée des séjours dans les hôpitaux a diminué, voire chuté de 20 pour cent chez les plus âgés vivant en CHSLD. Finalement, bien que la population aînée ait doublé en 30 ans, les dépenses en santé n'ont pas subi de hausses plus rapides que les revenus gouvernementaux.

Finalement, la prise en charge des aînés dépendants par les aînés représente une économie substantielle pour le gouvernement. Plus du tiers de l'intervention de première ligne auprès des proches ou amis est assumé par un conjoint ou un membre de la famille.

Tous ces éléments contribuent à réduire le recours aux services de santé et font contrepoids à la pression qu'exerce sur le système le surnombre de personnes âgées. Le vieillissement de la population est certainement loin d'être le seul vecteur de l'élévation des dépenses en santé. Ce sont plutôt l'accroissement général de la demande de soins, le coût astronomique des technologies et des médicaments, et les difficultés de gestion qui sont à pointer du doigt.


Les aînés : un boulet ou une ressource pour la famille ?

Un autre mythe persistant laisse entendre que les aînés constituent un fardeau pour leurs proches. Or, ce n'est qu'en situation de maladie grave ou d'incapacité que les aînés requièrent plus de soins et d'attention. Pendant les longues années où ils sont autonomes, plusieurs exercent le rôle de soutien, sous forme de gardiennage, d'aide financière ou de réconfort. On ne s'en étonnera point sachant que leur progéniture manque souvent de temps ou se voit aux prises avec toutes sortes d'ennuis, financiers ou de travail notamment.

Enfin, en plus d'être des porteurs d'héritage, les grands-parents se révèlent des piliers et des sources d'inspiration pour plusieurs adolescents en mal de repères identitaires et de confiance en soi. C'est ici qu'intervient la figure du grand-parent, plus essentielle que jamais, pour cimenter les liens familiaux et souder les générations.

Richard Lefrançois est professeur associé à l'Université de Sherbrooke.

© 2007 La Tribune (Sherbrooke, Qc). Tous droits réservés.

Numéro de document : news·20071103·TB·0024





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